Pourquoi la France rejette l’accord Mercosur ?
Le Président de la République, Emmanuel Macron, et le Premier ministre Michel Barnier ont exprimé clairement leur intention de rejeter le volet agricole de l’accord du Mercosur. L’ancienne sénatrice des Yvelines et ministre déléguée en charge du Commerce extérieur, Sophie Primas, a affirmé que cet accord n’était pas « acceptable en l’état ». « Sur les enjeux agricoles comme sur les questions environnementales, le compte n’y est pas », a-t-elle expliqué. Voilà pourquoi la France cherche à réunir une minorité de blocage pour s’opposer à cet accord. Pour ce faire, il faudrait au moins quatre États réunissant 35% de la population européenne. Pour l’heure, l’Italie s’est ralliée à la position française. La Pologne et l’Autriche pourraient suivre la même voie.
Une opposition pour protéger les agriculteurs français
L’opposition à cet accord a d’abord pour but de rassurer les agriculteurs dont la colère monte et qui sont très opposés au Mercosur.
Pour autant, laisser croire que la sortie de cet accord ouvrira des lendemains radieux pour notre agriculture est une fable.
Les conséquences réelles de l’accord Mercosur
A-t-il fallu attendre le Mercosur pour que la France ait perdu en 60 ans 80% de ses exploitations, soit plus de 5 millions d’emplois ? Pour qu’il existe aujourd’hui moins de 400.000 exploitations en France alors qu’il y en avait encore plus du double en 2016 ? Pour que depuis 2019, pour la première fois depuis la fin de la guerre, la France ait importé plus de produits agricoles qu’elle n’en a vendus ? Pour que la France exporte aujourd’hui (quelle honte !) 70% des fruits et légumes que nous consommons ?
Le Mercosur n’est donc rien d’autre qu’un ennemi bien commode. Et d’ailleurs est-on si sûr que sa mise en application serait aussi catastrophique qu’on le prétend pour nos producteurs et nos paysans ?
Les importations agricoles : des chiffres à relativiser
D’abord, les chiffres d’importations sont assez modestes : 1,6% de la production européenne de viande de bœuf ; 1,4% de volailles, sans compter les clauses de sauvegarde qui permettent à l’Europe de sortir de l’accord au cas où le marché serait gravement perturbé.
Opportunités économiques : un marché à conquérir ?
Et en contrepartie, car il y en a une, c’est l’ouverture d’un marché conséquent que favoriserait la suppression pour 4 milliards d’euros de droits de douane. Pourquoi croyez-vous que l’Allemagne soit aussi favorable à la signature de ce traité sinon parce qu’elle y voit un moyen de sauver une industrie automobile malade ?
La question qu’il faut donc se poser est de savoir où sont vraiment nos intérêts. Et le mensonge à éviter est de faire croire que le rejet de l’accord sauvera notre agriculture.
Repenser la politique agricole française
Les Chinois regardent d’ailleurs nos tergiversations, le sourire aux lèvres. Car eux, sont prêts à conquérir ce marché s’il nous échappe.
Pour le reste, il faut s’attaquer aux vrais problèmes, c’est-à-dire repenser une politique agricole qui, depuis une vingtaine d’années et notamment depuis l’abandon des quotas en 2015, est allée d’échecs en échecs. Le modèle français est à l’agonie : il ne produit plus, il coûte trop cher, il est paralysé par une administration omniprésente, il ne nourrit plus ses agriculteurs.
Et le Mercosur n’y est pour rien.