La Censure, Notre-Dame et les Défis de la Démocratie Française

Publié le 22 décembre 2024

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La Censure, Notre-Dame et les Défis de la Démocratie Française

Patrice Carmouze

Chronique

En quelques heures, la France a montré ses deux visages.

D’abord, le visage aux traits creusés, au sourire attristé, vieillissant, fatigué, usé. C’était celui qu’elle a montré après que la censure avait été votée à l’Assemblée nationale. La France impuissante, incapable de s’accorder, d’aller de l’avant, enfermée dans ses querelles et ses postures et surtout délaissée par ceux qui ont pour devoir de la servir.

Ensuite, le visage plein de force et de jeunesse, conquérant, heureux, rayonnant. Tout le contraire de cette face refermée qu’elle avait montré les jours précédents. C’était la France de Notre Dame. Et les étrangers qui nous regardent ne s’y sont pas trompés, qui nous moquaient ou nous plaignaient jeudi et nous admiraient samedi. La France Janus à deux visages.


La différence essentielle entre les deux événements (et on pourrait faire la même remarque pour la réussite des JO) tient à notre relation au pouvoir.

La France Janus : deux visages contradictoires

Lorsque Notre Dame a brûlé le 15 avril 2019, le Président de la République a donné l’ordre que la restauration et la reconstruction de la cathédrale soient faites dans un délai de 5 ans. La loi du 29 juillet 2019 a organisé la question financière et notamment celle des dons. Un établissement public a été créé le 1ᵉʳ décembre 2019, présidé – ce n’est pas un hasard – par un militaire, le Général Georgelin. C’est donc un mode de gouvernance vertical qui a été choisi.

Pas de débats, pas de consultation, mais tout le monde est mobilisé sur un objectif commun, la réouverture de Notre Dame en 2024. On est allé plus vite que ne l’exigeaient les fonctionnaires et les architectes publics qui se répandaient en 2019 pour dire que les délais ne seraient jamais tenus et qui se plaignaient de cette loi d’exception qui enjambait les réglementations des administrations du patrimoine et de l’environnement. Preuve que certaines réglementations nous embarrassent plus qu’elles ne nous protègent.

Le même fonctionnement (équipe resserrée, gouvernance par le haut) est aussi l’une des explications de la réussite des JO de Paris.
On pourrait regretter le déficit démocratique de ses fonctionnements. Mais force est de constater que les résultats sont là.

À l’opposé exact, notre Assemblée nationale. Ici, c’est le rôle du collectif qui compte, d’autant plus important qu’il n’existe plus de majorité absolue. Or, on ne peut que constater l’incapacité, l’impuissance de nos élus à faire vivre la démocratie. C’est triste et problématique. Parce que finalement, malgré les critiques qu’on adresse à un système trop vertical ou au « jupitérisme » du Président, on en revient toujours au même, c’est-à-dire à l’idée que seul un homme (ou une femme) providentiel pourra nous sortir de l’impasse.

D’où l’appel de Marine le Pen et de Jean-Luc Mélenchon (décidément toujours ensemble) pour réclamer le départ d’Emmanuel Macron. Et on va recommencer ainsi, sans cesse, à chercher ce monarque républicain dont on voudra couper la tête au bout de deux ans …

Voici alors que se pose une question qu’on n’aurait jamais pensé formuler : la France est-elle vraiment mûre pour la démocratie ?

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